13 Mai 2023
Selon un article BFM TV , lors de son déplacement à La Réunion, la Première Ministre Élisabeth Borne, intérogée au sujet du projet "France Travail" , a évoqué l'idée de sanctionner les bénéficiaires du RSA qui ne se conformeraient pas au "parcours" qu'on leur proposerait, en les privant, pour une durée plus ou moins courte, du RSA.
Dans la mesure où l'État et les collectivités auraient mis tout en oeuvre pour permettre aux bénéficiaires de résoudre leurs difficultés d'insertion, on pourrait trouver logique d'évoquer l'idée de les sanctionner si, au dernier moment, ces bénéficiaires rendaient vains tous ces efforts collectifs investis pour eux avec leur participation.
Mais dans la mesure où les bénéficiaires du RSA sont déjà très proches de la précarité, ne serait-il pas disproportionné de les faire basculer dans une plus grande précarité ?
N'est-il pas moralement et éthiquement questionnable de menacer de les plonger dans une plus grande précarité que celle qu'ils connaissent déjà afin de les contraindre ?
Peut-on légaliser la possibilité de pousser dans le grouffe une personne qui vit au bord du gouffre au motif qu'elle refuse de s'éloigner du bord du gouffre ?
Pour le moment, il est uniquement question de priver de RSA les bénéficiaires qui refuseraient de se "conformer" à un parcours d'insertion personnalisé qui aurait été élaboré avec eux.
Mais combien de pas idéologiques restera-t-il à franchir avant que ne soit rendue socialement et politiquement "acceptable" l'dée de priver de RSA ceux qui refuseraient un emploi qui ne leur conviendrait pas ? Combien en a-t-on déjà franchi avec les trois refus d'Offre raisonnable d'emploi ?
Après tout, qu'est-il censé y avoir d'autre au bout du "parcours" sinon un emploi ?
Si un bénéficiaire du RSA ne veut pas d'un projet professionnel qu'on lui propose, c'est qu'il n'y voit pas la perspective d'une vie meilleure, et qu'il préfère rester dans la pauvreté du RSA en attendant de trouver mieux.
En conséquence, le pousser de force à accepter un "parcours" dont il ne veut pas, ne pourrait pas être motivé par un désir Étatique d'améliorer l'existence des bénéficiaires du RSA.
Si ce n'est pas dans l'intérêt des bénéficiaires du RSA, dans quel intérêt l'État veut-il les mobiliser de force ?
Voici que, toujours d'après l'article de BFMTV, lors d'un point presse, Elisabeth Borne aurait déclaré ceci :
" On doit continuer à viser les leviers pour permettre à chacun de revenir vers un emploi. C'est d'autant plus important dans un contexte où on sait qu'il y a beaucoup d'entreprises qui cherchent à recruter et qui disent qu'elles n'y arrivent pas", Elisabeth Borne
L'intérêt des recruteurs ? L'intérêt économique de la France ?
Si telle est la raison pour laquelle le gouvernement envisage de mobiliser, sous la menace et contre leurs intérêts, les bénéficiaires du RSA, un tel projet ne devient-il pas incompatible avec la Convention d'abolition du travail forcé ?
Source : site officiel de l'OIT
Article 1 : Tout Membre de l'Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente convention s'engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n'y recourir sous aucune forme: a) en tant que mesure de coercition ou d'éducation politique ou en tant que sanction à l'égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l'ordre politique, social ou économique établi; b) en tant que méthode de mobilisation et d'utilisation de la main-d'oeuvre à des fins de développement économique; c) en tant que mesure de discipline du travail; d) en tant que punition pour avoir participé à des grèves; e) en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse.
Fin de l'article.